Il y a quelques jours, la rumeur lancinante a été confirmée par l’intéressé lui-même (Le point 8 mars 22), Cédric O quitte la politique pour rejoindre le privé. Et comme le rapporte le point, il rejoindra nombre de ses prédécesseurs comme Axelle Lemaire, Fleur Pellerin ou encore Nathalie Kosciusko-Morizet ou Eric Besson. Il sera intéressant de voir quels groupes industriels il ira rejoindre…
Quel bilan sur son action en regard de la souveraineté numérique ?
En étant réaliste, il a appliqué au numérique l’approche du gouvernement actuel dans ce qu’il a de plus futile et nocif… Si on veut résumer la politique gouvernementale sur le numérique dans ses actions emblématiques :
- Choix de #microsoft pour le Health Data Hub (Plateforme de données de santé en bon français, mais c’est plus chic en anglais, non ?)
- Choix d’#aws (#amazon) pour héberger le dossier des entreprises ayant recourt au PGE (Prêt Garanti par l’Etat) à la BPI. Où es informations sensibles sur nos sociétés les plus innovantes sont à la portée de sociétés étrangères (américaines).
- Le choix par la SNCF société publique ou l’état est non seulement l’actionnaire mais aussi le principal créancier a choisi de migrer tout ou partie de son infrastructure sur #aws…ou voici les données des Français, servez-vous, on vous paye pour ça.
- Il semblerait que les communications que je juge pour ma part sensibles entre l’état et la représentation nationale passe par #Telegram une application d’origine Russe mal sécurisée (tout est en clair sur les serveurs…) En temps normal cela me parait être une bévue, et compte tenu de la situation géopolitique c’est désormais une faute.
- Notre secrétaire au numérique s’affiche avec un T-shirt avec le logo Google…
- Je ne ferais qu’évoquer la pitoyable tentative du Cloud de Confiance qui n’a de confiance que le nom, destinée à permettre aux américains de continuer à obtenir des marchés en France, marchés qui ne devraient pas leur être ouverts du fait de la GRPD/Data pricacy shield.
Cependant il semble qu’une prise de conscience soit amorcée dans les paroles sur la nécessité de s’occuper de notre souveraineté numérique. Quelques mesures vont dans le bon sens :
- Interdiction par la Dirnum de déployer O365 dans nos administrations, nos acteurs français du numérique ont tout de suite réagi par un communiqué de presse, et ont montré par la même que des alternatives françaises sérieuses existaient.
- Nous avons un député Philippe Latombe de la majorité gouvernementale qui s’évertue à faire prendre conscience à ceux qui nous gouverne des enjeux et de la nécessité de reconquérir notre souveraineté aussi dans le domaine du numérique (Entretien du 17 décembre 21)
- L’arrivée de l’Espace Santé, où miracle nos données sont hébergées en France et a priori pas dans le « cloud » (Entretien du 8 mars 22)
Comme vous pouvez le constater le bilan est au minimum mitigé, et j’aurais tendance à le juger sévèrement.
Quelles questions soulèvent se départ ?
Sur le bilan pas de nouvelles questions, par rapport à ce qui a été évoqué plus haut. Par contre se pose la question de savoir quelle entreprise il va rejoindre… Ce départ pour le privé sera-t-il pour une entreprise française ou une association reconnue comme pour Axelle Lemaire, ou encore dans des fonds d’investissements (Investissements Coréens) comme Fleur Pellerin, ou encore rejoindre une entreprise française pour des activités aux US comme Nathalie Kosciusko-Morizet, et finir dans un fonds d’investissements français. Ou, son choix comme il se murmure dans les milieux informés, faire comme un certain nombre de hauts fonctionnaires avant lui, rejoindre l’un des grands du numérique américains (Numérama) ?
Si tel était le cas, il serait souhaitable que la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique prenne les mesures et sanctions nécessaires. Il sera tout aussi pertinent de regarder le choix de cette entreprise, notamment s’il s’agit d’une start-up, quels seront les fonds d’investissements. En effet, il est nécessaire de s’assurer que ni le carnet d’adresse du secrétaire d’état, ni sa connaissance de la mise en œuvre future de certaines décisions politiques ne puissent être utilisés à l’encontre des intérêts nationaux et des acteurs du numérique français.
Conclusion
Cependant, à la décharge des politiques du gouvernement, il reste un autre acteur à faire bouger, il s’agit de la haute administration française et de ses liens troubles par copinage, et leur possibilité de pantoufler au sein des entreprises américaines notamment, mais les chinoises ne sont pas en reste…
Cette affaire est emblématique d’un mal français, qui est présent à deux niveaux.
Tout d’abord dans l’administration (d’une façon générale) où la pratique du pantouflage, ne nécessite pas une réforme mais une suppression. La logique voudrait que lorsque vous souhaitez quitter la fonction publique, vous ne puissiez y retourner autrement qu’en re-postulant et en ayant perdu tous vos avantages de votre passage précédent (ancienneté, grade, etc…)
Ensuite, pour les politiques ayant eu des fonctions gouvernementales ou ayant siégé dans des commissions sensibles, il ne doit pas être possible pour eux de partir travailler pour des intérêts économiques étrangers quel que soit le pays (Il est choquant que Monsieur Fillon ait pu aller travailler pour des entreprises Russes par exemple) ! Les clauses de non-concurrence ne s’appliquent visiblement qu’au privé…
Le choix de l’entreprise dans laquelle il va atterrir sera un marqueur fort intéressant, et nous en dira beaucoup sur la vision de l’intérêt commun qu’ont nos élites dirigeantes…