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Rencontre avec Alain Garnier C.E.O de Jamespot

Aujourd'hui j'ai le plaisir de partager avec vous un échange avec Alain Garnier co-fondateur et C.E.O. de Jamespot, solution de réseau social d'entreprise mais pas uniquement.

Alain Garnier CEO de Jamespot

Aujourd’hui, j’ai le plaisir de partager avec vous un échange avec Alain Garnier Linkedin - Free social media icons, co-fondateur et CEO de Jamespot, solution de réseau social d’entreprise mais pas uniquement.

Nous avons eu l’occasion d’interagir sur des sujets liés à la souveraineté numérique. C’était une bonne opportunité pour parler de son parcours entrepreneurial, de ses motivations et d’aborder un sujet qui nous anime tous les deux, celui de la souveraineté numérique.

 [Emmanuel M] : Bonjour Alain, vous avez co-fondé Jamespot en 2005. Pourriez-vous nous parler des phases clés de votre développement (création, pivot, rachats) ?

[Alain Garnier] : Bonjour Emmanuel, C’est vrai déjà 15 ans pour Jamespot… La création de Jamespot, c’est la volonté pour les co-fondateurs de remettre l’humain dans les systèmes d’information, notamment pour les entreprises. Et après une première phase orientée « Social Bookmarking » plutôt B2C, on a étendu aux documents, agenda etc…  En y rajoutant la communication temps réel (Chat) et c’est ce qui a fondé le socle du Réseau Social d’Entreprise résolument B2B. On est en 2010 et c’est notre premier pivot fort. Depuis, on est resté dans ce sillon avec une très forte croissante. On a repris 3 concurrents durant cette phase, ce qui a encore accélérée la croissance.

De votre point de vue, quelle est la principale valeur que vous souhaitez apporter à vos clients ? Et quelle valeur disent-ils en retirer dans leurs témoignages ?

[AG] : C’est difficile de résumer à une seule valeur. *rire* d’autant que justement Jamespot est une plateforme avec des dizaines d’applications à activer qui apportent chacun sa valeur… Mais si je n’en retiendrai qu’une seule, c’est la libération de la collaboration quel que soit le mode choisi : synchrone, asynchrone, au bureau ou en mobilité. Et en général, les effets sont immédiats, par exemple les groupes d’entraide font quasiment systématiquement un strike !   

Quelles sont vos ambitions pour le développement de Jamespot dans les trois années à venir ?

[AG] : On ambitionne de continuer à servir nos clients de plus en plus en profondeur dans les usages. On a par exemple réinventé l’Intranet avec Fast Intranet pour produire des pages aussi simplement qu’un document texte. Autre exemple, la Visio qui est un élément central de la collaboration synchrone dans le télétravail. Voilà pour le produit. Innovation & usages.

L’autre ambition est de devenir le leader européen de ce domaine.  C’est donc l’expansion internationale. Nous avons commencé à poser les fondations de ce développement. Mais dans notre modèle autofinancé ça prend du temps…

L’offre « HDS », dédiée aux données de santé, a particulièrement attisé ma curiosité (du fait de mon expérience). Pouvez-vous nous en parler plus en détails ? Combien de clients environ avez-vous actuellement sur cette offre ? Quelles en sont les particularités ?

[AG] : On a été ravi quand OVHCloud, notre fournisseur principal de Cloud a proposé un hébergement HDS. On avait déjà des demandes, mais cela nous a permis de réellement rentrer sur ce marché de la santé. On a donc des clients comme le CPTS28 et le GIE Val de Loire Santé afin de réunir le tissu des médecins libéraux. On l’a vu avec la crise du Covid, le monde de la santé a besoin d’outils pour se coordonner… et on s’est retrouvé face à une pénurie non seulement de masques… mais aussi d’outils ad hoc. Il est urgent de se doter d’un plan sur le sujet en France et pour l’Europe.

Pour finir le tour d’horizon, pourriez-vous nous brosser un résumé de vos résultats financiers et de pénétration du marché (si ces informations ne sont pas confidentielles) ?

[AG] : On a pour habitude de publier nos comptes. Ce qui n’est pas le cas de tout le monde. *rire* On a fait une très belle année 2019 avec +30% de croissance et avec un résultat positif, malgré le fait d’avoir énormément investis… et en ce qui concerne 2020, on est sur une tendance encore plus forte de croissance. Mais la crise du Covid nous rend prudent. Qui sait ce qui va se passer dans les mois qui viennent après les mesures actuelles qui ont empêchées que l’économie s’écroule ? On est donc prudent.

Après ce panorama de vos activités et de la présentation de votre solution, nous allons évoquer ce qui a provoqué notre rencontre. En effet, militant de la souveraineté numérique, j’aimerais savoir quel est votre sentiment à ce sujet ?

[AG] : Vaste question. Le sujet est essentiel, on l’a vu avec la crise du Covid. Tout d’un coup, on a vu l’Education Nationale, les hôpitaux, etc sous équipés en outils numériques… Il a fallu se tourner en urgence vers les outils américains. C’est flagrant. Ce n’est que la situation réelle. Aujourd’hui, plus de 76% des logiciels consommés en France sont américains. On est donc dépendants. C’est un problème de fond pour une économie développée comme la France.

Pour les mois à venir, pensez-vous que cette prise de conscience va réellement faire changer d’opinion les décideurs des entreprises françaises ?

[AG] : Je l’espère en tout cas. Cela fait longtemps que le sujet est sur la table. Mais il n’est pas relayé suffisamment, et au fond, le problème « arrangeait » bien les décideurs notamment des grands groupes, ou encore des ministres, qui bénéficiaient de « produits quasi gratuits » …  

Je sens que la crise change les mentalités. Et l’Appel du 9 Avril qu’on a lancé, a mis ce sujet à nouveau en exergue. Avec l’idée centrale qu’il est temps pour l’Europe de son émancipation. Et ce terme, plus de souveraineté parle à tous. Oui, il est temps un jour de quitter le nid douillet des parents pour faire sa propre vie. C’est ce que nous proposons aux décideurs.

Quelles solutions voyez-vous pour pérenniser notre écosystème de solutions souveraines ? Quelles initiatives dans ce domaine soutenez-vous ?

[AG] : Je pense que la solution principale est avant tout culturelle. Elle peut aussi passer par la loi, pour ré-équilibrer les flux économiques. Mais quand on regarde, c’est d’abord une question de mentalité. Dans l’Appel du 9 avril, on pousse la notion d’exemplarité. C’est une nécessité. Tant que l’état et les pouvoirs publics préféreront faire entrer le loup dans la bergerie en laissant des opérateurs américains proposer leurs produits gratuits… nous ne pourrons pas lutter.

Imagine-t-on le pentagone prendre un outil français ? Jamais. Ayons le même raisonnement. Tout simplement.

Sachant que pour moi, il ne s’agit pas de « bouter les Américains » hors de France. Reproche souvent fait à la démarche. Mais de rééquilibrer les parts de marché des trois macro-continents : USA / Europe / Chine.     

Pensez-vous que l’Open Source constitue une alternative afin de renforcer notre indépendance face aux géants américains et chinois ?

[AG] : L’Opensource est un des éléments de la recette en effet. Il correspond bien à notre culture : les services publics sont des « communs ». Mais il ne peut pas être la seule réponse. Le modèle est justement à trouver entre services « packagés & propriétaires » avec une logique de marché forte, et des composants communs à ces acteurs.

Aujourd’hui, les deux mondes ne se parlent pas assez. Et les bases d’un flux économique juste pour tous n’est pas assez clairement posé. C’est une des clés principales à la réponse originale Européenne à construire.  

Pensez-vous que la France ou l’Europe sont capables de produire sur leur territoire le hardware ou est-ce une cause déjà perdue ? En avons-nous les compétences ?

[AG] : Il n’y a jamais de cause perdue ! En revanche, il y a des causes qu’on n’essaye pas… et elles sont perdues assurément. Je prends un exemple, Arduino, une réussite incroyable dans l’IOT. C’est au départ une initiative italienne (!) qui est devenue une référence mondiale. Et pourtant, personne n’aurait imaginé cela possible. Voilà comment on doit procéder : en arrêtant de penser que c’est impossible. Et en appuyant les initiatives qui marchent !

Nous arrivons à la fin de cette interview, quelle serait votre conclusion en forme de message à nos lecteurs ?

[AG] : Qu’on a la chance de vivre cette période ! Tout est à ré-inventer dans le Digital. Et après 30 années d’une Europe molle, qui a subi les cycles et les évolutions, il est temps de s’émanciper pour profiter pleinement de cette formidable révolution.  Et que c’est à chacun de franchir le premier pas de ce voyage.

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