Au risque de choquer par un langage cru, cet article est un véritable coup de gueule ! Pour les lecteurs qui me suivent, cela ne sera pas une surprise, cela fait un certain nombre d’années que je défends notre souveraineté, et plus particulièrement de façon active notre souveraineté numérique. Je ne rappellerais pas, les raisons logiques qui devraient nous pousser à prendre en compte cette dimension.
Ce qui provoque ma colère, c’est une nouvelle fois la désinvolture avec laquelle nos technocrates européens hors-sol, représentés magnifiquement par Ursula Von Der Leyen, ont bradé en catimini les données des citoyens européens aux Etats-Unis.
Les faits
La crise ukrainienne a des impacts insoupçonnés.
Rappelons que le choix politico-idéologique de nos « partenaires » allemands de sortir du nucléaire a augmenté leur dépendance aux énergies fossiles, charbon et gaz, avec une dépendance essentielle au gaz Russe.
La crise ukrainienne vient bouleverser tout cela, et cette dépendance devient difficile à assumer, pour en sortir, nos « amis » allemands ont besoin du gaz liquéfié américain.
Les américains ne sont que trop heureux de tendre la main aux Allemands et proposent d’ouvrir généreusement les vannes de leur gaz. Pour quelle contrepartie ? La satisfaction de sanctionner les Russes ? Certes. Les $ sonnants et trébuchants ? Certes, mais aussi et surtout nos données.
Comme nous avions eu l’occasion de l’évoquer dans l’excellent entretien avec le Député Philippe Latombe et nos acteurs du numérique français, nous avions une fenêtre de tir de 3 à 4 ans afin de permettre à nos entreprises françaises et européennes de grandir et de venir de solides alternatives aux solutions américaines (Les Rendez-vous du Numérique Mars 2022).
Cette possibilité vient d’être réduite à néant par Ursula Von der Leyen, qui a sacrifié sur l’autel des intérêts allemands, l’industrie du numérique européenne et française. Si j’étais cynique, je dirais que cela a été fait à propos, car il me semble que c’est l’un des rares secteurs industriels où l’excellence française n’est pas un vain mot, et dans lequel on est en capacité de construire un leader mondial, ou tout du moins européen. De là à penser qu’il ne faut pas faire de l’ombre à l’économie allemande, coûte que coûte, il y a un petit pas que je ne franchirai pas…
Ce qui est plus inquiétant, c’est le silence assourdissant de nos responsables politiques. Notre secrétaire d’état chargé du numérique Cédric O est probablement plus occupé à préparer sa reconversion dans le privé, pour une entreprise américaine (Effisyn SDS) ? Quant à notre Président, ce n’est guère mieux, vous avez dit souveraineté ? Désolé, pas le temps, il faut sauver la paix dans le monde.
Privacy shield-2 que faire ?
C’est une question à laquelle il est difficile de répondre pour le moment, si cela se confirme, il va nous falloir réagir, sinon les conséquences seront désastreuses.
En effet, il est difficile de croire que les raisons qui ont amené à l’invalidation du #SafeHarbor (arrêt #schremmI de la CJUE), puis à l’invalidation du #PrivacyShield (arrêt #schremmII de la CJUE) ont disparu. Il n’y a aucun signe qui montre que la législation américaine ait drastiquement évoluée depuis cette dernière invalidation.
Le nœud du problème, ce sont les lois américaines qui n’offrent pas du tout la même protection des données personnelles des personnes. En France et en Europe vos données vous appartiennent, aux US, elles appartiennent à ceux qui les collectent, comme les #gafam… Ce point-là ne sera pas, a priori résolu par une quelconque mouture du #PrivacyShield.
Si ces informations (a priori solides), se confirment il nous faudra nous mobiliser, nous acteurs du numérique français et européen, pour que nous aboutissions rapidement à un arrêt #schremmIII de la #CJUE.
En parallèle, il serait aussi judicieux d’exiger une enquête au niveau européen, afin de comprendre comment cette décision a été prise, quel était le mandat de discussion, l’ensemble des partenaires européens étaient-ils impliqués. Quel rôle a eu Ursula Von der Leyen dans cet accord, a-t-elle sacrifié les intérêts européens aux intérêts allemands ?
Conclusion
Bien que passée sous le radar médiatique, cette décision a fait réagir nombre d’acteurs du numérique français. La plupart sont désabusés, et reçoivent cette nouvelle comme un coup de massue, ou plutôt un coup de couteau dans le dos.
Je crains qu’hélas nos dirigeants politiques ne soient dans l’incompréhension totale de ce que représente l’industrie du numérique pour notre économie future, et/ou qu’ils ne soient totalement vassalisés de corps et d’esprit à l’impérialisme américain.
Je ne suis même pas persuadé, que même dans le cas improbable où l’actuel locataire de l’Elysée ne serait pas reconduit les choses changent significativement.
Cependant le combat continue, et si les utilisateurs finissent par comprendre la nécessité de changer de modèle qui nous assujetti aux technologies américaines, nous arriverons à gagner notre indépendance numérique. Le chemin sera long et difficile, devant l’incurie de nos dirigeants il me semble important que les citoyens dans le numérique comme ailleurs que cela soit dans le domaine privé ou professionnel se transforment en consom-acteurs !
Si dans nombre d’entreprises, grandes ou petites les dirigeants et/ou acheteurs imposaient des critères de souveraineté / indépendance technologique, ce afin de prendre en compte le risque géopolitique, mais aussi l’impact social et environnemental dans le choix du numérique, nous pourrions redessiner le paysage du numérique français qui est actuellement vassalisé aux technologies américaines !